Dans de nombreuses entreprises, les managers ne savent pas quelle posture adopter face aux salariés détenteurs d’un mandat dans leur équipe.
Qu’ils soient délégués ou représentants syndicaux, élus CSE ou représentants de proximité, leurs droits, revendications, manières de communiquer ou de transmettre des informations peuvent s’avérer déconcertants et, si le manager le vit ou le gère mal, détériorer le climat social dans une équipe.
Nos 30 ans de conseil nous ont souvent prouvé que ces salariés détenteurs d’un mandat électif ou désignatif ont souvent beaucoup à apporter au manager et que des relations sociales en entreprise peuvent bel et bien être constructives.
Forts de nos 30 ans d’expertise en relations sociales, nous partageons donc nos conseils avec vous pour bien manager un Délégué Syndical (DS) pour atteindre la performance collective.
Quelle est la différence entre un délégué syndical et un représentant syndical ?
La principale différence entre le délégué syndical et le représentant syndical est le fait que le délégué a été élu (par au moins 10% des suffrages lors des élections professionnelles) et bénéficie donc du monopole de négociation des accords collectifs et est membre du CSE (uniquement dans les entreprises qui comptent entre 50 et 300 salariés). Il a donc un crédit d’heures pour exercer son mandat.
Le représentant syndical, quant à lui, participe aux réunions du CSE mais sans droit de vote et ne négocie pas les accords d’entreprise et n’a pas de crédits d’heures (sauf dans les entreprises de 500 salariés au moins ou si un accord d’entreprise le prévoit.)
Connaître les droits et obligations du délégué syndical : l’obligation du manager
Avant toute chose, le manager doit connaître les droits des délégués syndicaux et les périmètres de leur mandat. Voici la liste des droits des délégués syndicaux :
- Les heures de délégation : 12h/mois pour une entreprise de 50 à 150 salariés ; 18h/mois dans une entreprise de 150 à 499 salariés ; 24h/mois pour une entreprise de plus 500 salariés.
- La liberté de circulation des élus pendant leur temps de travail, sous réserve de ne pas gêner l’exécution du travail des salariés. Ils ont accès à tous les locaux où travaillent des salariés (sauf si l’entreprise interdit des lieux pour des raisons de sécurité ou d’hygiène).
- Le droit à un local : les délégués du personnel doivent avoir un endroit où se réunir, prévu par l’employeur.
- La liberté d’expression : les délégués syndicaux peuvent distribuer des tracts, afficher des informations sur des panneaux d’affichages, sur l’intranet, par mail… Cette liberté d’expression a néanmoins des limites : l’injure, la diffamation et le non-respect de la vie privée en font partie. Les représentants du personnel ont également une obligation de discrétion pour les informations confidentielles communiquées par l’employeur.
- La protection contre le licenciement : pendant toute la durée du mandat syndical et durant 12 mois après celle-ci, l’employeur ne peut pas modifier le contrat ou licencier un salarié syndiqué sans faire appel à un inspecteur du travail et suivre une procédure bien précise.
Organiser un entretien de début de mandat : poser les bases d’une relation constructive
Prévue en début de mandat pour le délégué syndical, cette réunion est facultative mais fortement encouragée pour créer un lien de confiance avec le délégué syndical.
Cette réunion de cadrage permet de discuter de nombreux points :
- Les besoins et attentes de chacun
- L’articulation de la vie professionnelle et des fonctions syndicales
- L’adaptation de la charge de travail
- Les heures prévisionnelles de réunion
- Le respect du délai de prévenance
Pour poser les bases d’une collaboration efficace entre le manager et le délégué syndical, un compte- rendu peut être écrit à l’issue de cette réunion.
Adopter la stratégie des alliés pour manager les délégués syndicaux
« Un projet ne meurt pas du fait de ses opposants mais du manque d’alliés : seuls les vrais opposants, irréductiblement opposés au projet considéré (les positions sont dynamiques par nature et jamais figées) ne sont pas des alliés potentiels. »
La sociodynamique, qui est une science du management, nous apprend que dans tout projet, il vaut mieux focaliser son énergie sur les alliés que sur les irréductibles opposants. Cela s’applique très bien dans le cadre du dialogue social
Ainsi, parmi les délégués syndicaux, il y a naturellement des alliés potentiels dans le cadre de tel ou tel projet, qui pourront être un appui pour le manager. Le manager et les délégués syndicaux peuvent avoir des intérêts communs tels que :
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- La croissance de l’entreprise et la pérennité des emplois
- La santé et la sécurité des salariés
- Le respect des horaires
- La bonne entente des salariés
- Le bon déroulement du travail sans irritants sociaux ou blocages
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Parmi les opposants à un projet porté par le manager, certains sont peut-être des hésitants qui peuvent être convaincus et le manager peut également tenter de comprendre leurs réelles motivations et intentions sous-jacentes pour agir en conséquence afin de lever les freins et appuyer sur les leviers.
Relation manager- délégué syndical : communiquer de façon continue
Comme nous aimons à le dire dans nos missions de conseil et de formation en relations sociales d’entreprise, la communication avec les délégués syndicaux doit être continue et ne se limite pas à de simples réunions mensuelles.
Nous conseillons aux managers de mener des discussions informelles qui permettent de prendre la température et de faire des remontées de terrain, tout en accordant de la reconnaissance aux délégués syndicaux.
Le dialogue social se joue durant les 29 jours entre chaque réunion et pas seulement à la réunion du CSE ou lors d’une réunion de négociation.
Dans notre formation pour manager un salarié titulaire d’un mandat, nous insistons aussi beaucoup sur l’utilisation d’outils de communication pour rendre le dialogue plus fluide tels que le feedback, la communication non-violente, la reformulation, le recadrage, etc. qui permettent de cadrer fort utilement la relation avec les délégués syndicaux.
Veiller à ne pas favoriser ou discriminer les délégués syndicaux
Les délégués syndicaux sont protégés par la loi à plusieurs égards et notamment en matière de discrimination. Celle-ci représente un délit qui peut être sévèrement sanctionné.
Le manager doit donc pouvoir faire la différence entre les missions et objectifs du salarié et les fonctions occupées par le salarié dans le cadre de son mandat syndical.
Tant que le salarié respecte sa fiche de poste et ses obligations, le manager ne peut pas sanctionner un délégué syndical en lui reprochant son manque de disponibilité ou ses absences liées au mandat par exemple.
Pour ce faire, le manager peut sélectionner des moments de discussion dans la journée pour parler des différents sujets, ou poser un cadre en disant : “je m’adresse à toi dans le cadre de ton mandat” avant d’aborder des sujets qui en relèvent. À l’inverse, il est nécessaire d’identifier dans quel cadre le salarié parle lorsqu’il évoque des sujets au-delà des consignes de travail : mandat ou question de salarié ?
De la même façon, le manager ne doit pas favoriser ou privilégier les délégués syndicaux, en accordant une promotion ou prenant en compte les actions liées au mandat lors de l’évaluation annuelle, par exemple. Ceci étant, il peut néanmoins valoriser la montée en compétences (ex: gestion de projets, prise de parole, organisation, leadership…) du salarié si celle-ci a eu un impact sur ses responsabilités professionnelles.
Ces conseils pour bien manager un délégué syndical en entreprise vous permettront de trouver des solutions concrètes pour éviter des conflits inutiles, gérer des crises, anticiper les réactions des syndicats, favoriser un dialogue social constructif et contribuer ainsi à un meilleur climat social.